Pierre B.

La ligne 15

J’ai découvert le passage du bus numéro 15 en regardant son toit blanc qui m’aveuglait, il était midi.
Je me penchais depuis ma fenêtre du deuxième étage de mon appartement situé dans la rue centrale et commerçante de Pierre Bénite.
Son dernier arrêt dit terminus avait lieu sur la place de la mairie, Place Jean Jaurès.
J’appréciais ce centre ville animé.
Les boutiques juxtaposées exposaient dans leurs devantures les produits alléchants.
Il m’était pratique d’acheter un article qui me manquait : une bobine de fil, une feuille à dessin,
un sac de terreau, le dernier Goncourt à offrir…
Les effluves des pâtés, des plats mitonnés qui s’échappaient de la cuisine du traiteur me tenaillaient l’estomac. Longeant cette artère ensoleillée les autochtones se croisaient et bavardaient de vive voix, un paquet sous le bras.
Quelques années ont passé et le trajet du bus s’est étendu.
Désormais la commune de Pierre Bénite se trouvait au centre de l’itinéraire entre Irigny et Lyon. (…)

J’entre dans le bus comme on pénètre dans une salle commune.
Salutations au conducteur.
Salutations à des connaissances..
Conversation avec des hommes et des femmes venus s’établir à Pierre Bénite après les heures sombres endurées dans leur pays.
Le temps du franquisme, du fascisme, de la guerre d’Algérie etc…
Avec eux j’aime évoquer la culture et l’amour des pays méditerranéens.
Des sourires distribués à certains, ceux-là mêmes que je croise dans ma ville.
Et puis j’examine les Autres… (…)
Une maman parle à son enfant dans une autre langue, leur échange a une beauté qui me trouble.
Elle se doit d’être forte, car elle déploie la douceur de son affection et cache ses préoccupations.
J’ai envie de connaître leurs parcours. Fraterniser.
Et le voyage continuerait….